Le Fragon petit houx
Ruscus aculeatus L. (Asparagacées)
Les feuilles piquantes et les fruits rouges du petit houx (ou fragon petit houx) sont bien connus. En revanche, on ignore souvent à quoi ressemblent les fleurs. Et les feuilles ne sont pas des feuilles – et les tiges pas vraiment des tiges.
La fleur et le fruit sont insérés directement sur ce qui paraît être des feuilles, ce qui est impossible d’un point de vue botanique. En fait, il s’agit de cladodes, c.à.d. de tiges élargies, et qui remplacent les feuilles pour la photosynthèse.
La fleur apparaît tôt, ici le 20 mars (le fruit est de l’année précédente). On ne retrouve pas, au moins en apparence, la disposition classique d’un pistil entouré d’étamines. En fait, l’espèce est dioïque, c.à.d. qu’il y a des pieds femelles et des pieds mâles.
Sur la photo principale, la fleur est évidemment une fleur femelle puisque le pied porte un fruit. En encadré, figure une fleur mâle. On voit que les deux se ressemblent beaucoup.
Cladodes, fleur femelle et fruit de l’année précédente (La Cropte, 20/03/2022)
En encadré : fleur mâle (Changé, 23/03/2025)
Selon la Flore forestière française, la pollinisation est réalisée par des insectes et la dispersion des graines par des animaux.
On peut se demander quels insectes assurent la pollinisation puisque les fleurs sont peu visibles, apparemment dépourvues de nectaires et qu’elles apparaissent à un moment où les insectes sont encore peu actifs.
On peut également se demander quels animaux sont intéressés par les fruits qui sont certes bien visibles et disponibles à une époque où la nourriture est rare, mais qui sont peu charnus (il y a surtout 1 ou 2 grosses graines) et pas très accessibles au milieu des « feuilles » piquantes.
Le mode de développement est assez particulier. C’est une plante à rhizome (c.à.d. une tige souterraine). Le rhizome émet des pousses au printemps, qui se déploient un peu comme peuvent le faire les asperges.
Il s’agit d’une inflorescence, donc pas d’une tige au sens habituel (une fois qu’elle s’est déployée, elle ne produit pas de ramifications supplémentaires). Cette inflorescence persiste plusieurs années et les fleurs se succèdent sur la petite tige issue du cladode.
L’encadré montre la disposition des jeunes cladodes à l’aisselle de vraies feuilles (plutôt de bractées puisqu’il s’agit d’une inflorescence).
Les jeunes pousses sont comestibles et peuvent se consommer comme les asperges.
Jeune pousse qui se déploie ; en encadré : détail de l’insertion des cladodes (Saint-Berthevin, 28/04/2024)
Quelques compléments :
Détails sur les fleurs
Fleur mâle : les 3 étamines sont soudées en une sorte de petit tonnelet creux, avec les anthères (partie qui produit le pollen) au sommet. Si on l’ouvre, on voit le pistil avorté.
Fleurs mâles : encore en bouton ; bouton ouvert ; « tonnelet » ouvert qui montre le pistil avorté (23/03/2025, Changé)
Fleur femelle : on retrouve le petit tonnelet mais sans les anthères ; les étamines sont stériles. Cette fois, le pistil est bien développé et les stigmates font saillie à l’extérieur.
Fleur femelle : aspect extérieur et après ouverture du « tonnelet » (Saint-Berthevin, 24/03/2025)
Répartition
Le petit houx se rencontre dans les bois clairs, les talus, les haies… C’est une espèce neutrocline à large amplitude c.à.d. qu’elle préfère les sols proches de la neutralité mais avec une grande tolérance. Elle apprécie les sols moyennement secs à moyennement humides.
En Mayenne, elle est très commune dans le centre du département mais beaucoup moins présente dans le nord ; et même dans le sud-ouest, elle est moins fréquente (source : eCalluna).
Au niveau de la France, elle est absente d’une bonne partie du nord-est, du Massif central et des Alpes (source : Si Flore).
© J-C Lebreton